Pour participer à cette force de guérison que suscitait Jésus, il y a une seule condition, y croire : « Ma fille, ta foi t’a sauvée ». Cette foi, ce n’est pas qu’une croyance, qu’une opinion qu’on chercherait un peu comme une idée sur un sujet. La foi est quelque chose de vital. La foi juste comme belle préoccupation, quelques belles idées, ce n’est pas la foi. Jaïre tombant à genoux, la femme éprouvée depuis des années par ses pertes de sang nous invitent à chercher à les accompagner. Alors la foi fait viser l’essentiel, ce qui compte radicalement, ce sans quoi nous ne pouvons vivre. L’Évangile nous montre Jésus devant des drames humains. Par-là, on peut comprendre que notre foi, notre décision de nous référer à Jésus-Christ, concerne le salut. Que c’est tout autre chose qu’une manière d’être quelque part en règne par rapport à des prescriptions, et que ce soit encore un crédo bien retenu pour avoir droit de citer parmi une population dite croyante, même si de loin, certains ne diront guère plus que « Je crois qu’il y a quelque chose », ou « je crois qu’il y a quelque chose après la mort ». Croire en Jésus-Christ, c’est autre chose qu’une sorte d’assurance qui nous faire penser que l’éternité s’ouvrira à nous. Un texte d’Évangile reste une semence d’éternité lancée dans la terre que nous sommes pour une surabondance de fruits à partager. Ces deux personnes qui vont être touchées par la miséricorde de Dieu, nous pouvons nous mettre à leur place, nous reconnaître en elle pour une guérison qui sera plus précisément une conversion ou encore un accueil de la vie divine.
Plus qu’une nouvelle rassurante qui pourrait nous faire nous reposer tranquillement, Jaïre, sa fille et la femme aux pertes de sang nous bousculent : ne serait-il pas temps de chercher à croire, à vivre notre foi comme une relation authentique avec le Seigneur. Recevoir ainsi une semence de vie éternelle, c’est dire que nous pouvons vivre en présence de Dieu, quitter nos zones de confort si nous avons de la chance, quitter nos critiques ou nos lamentations si nous n’avons pas de chance, pour accueillir l’amour du Seigneur, et vivre dans l’inventivité d’un amour pour Dieu et pour nos frères. Vie et mort sont en jeu. Mais pas seulement par peur qu’il n’arrive du mal à notre petit « moi ». Avec Jésus, être sauvé, c’est accepter de nous laisser interpeller pour laisser mourir ce qui doit mourir, quand cela nous referme sur nous-mêmes et revivre de ce qui doit faire porter tous leurs fruits à l’amour et à l’espérance,
Tout le monde est concerné par l’appel à croire. Marc l’évangéliste, rapportant deux récits plutôt qu’un nous le fait comprendre ici. Jaïre est un chef de synagogue, l’homme le plus recommandable qui soit ; mais à l’autre bout de l’échelle sociale, si on peut dire, il y a cette femme, interdite de séjour en quelque sorte ; sa maladie entraînant des pertes de sang continuelles la mettait en état d’impureté légale : or c’est à cette femme impure que Jésus parle de salut ; au vu et au su de tous, il la réintroduit dans la communauté. L’un et l’autre vont avoir une attitude qui en dit long : ils tombent aux pieds de Jésus. Et pourtant, l’histoire nous montre que ce n’est pas une situation où tout serait dans les mains de Jésus. Jaîre le ferait bien penser quand il dit à Jésus : viens lui imposer les mains. Le pouvoir de guérison sera plutôt montré par une autre affirmation : « Ta foi t’a sauvé. »
Que veut dire pour nous ce salut, ce n’est pas qu’une maladie. On a beau dire Jésus médecin des âmes ; il y a quelque chose de différent. Dire l’importance de la vie, dire qu’une vie est sauvée sonne tellement plus juste quand cette vie a été menacée, quand on a fait l’expérience de notre fragilité. L’Évangile à vivre, c’est au nom de Jésus, prendre en souci, prendre en miséricorde, en tendresse comme l’Évangile parfois le dit, des petits, que ceux qui se sentent plus fort au nom du Seigneur, aient ce regard de bonté pour soutenir leur frères et sœurs plus spécialement touchés par ce qui atteint leur dignité. Les mesures économiques ou les remèdes qui toucheraient uniquement le côté physique ou matériel ne suffit pas. Tout se tient. Le bien fait à quelqu’un, fille de chef respectable, ou anonyme cachée considérée infréquentable, pour reprendre les catégories de notre évangile, ce bien fait au nom de Jésus concerne toujours un respect à restaurer, une personne et sa dignité.
Nous entendions un psaume qui chantait Dieu, qui faisait résonner une joie profonde pour son action. « Je t’exalte, Seigneur, tu m’as relevé » C’est l’expérience d’un peuple que le Seigneur n’a pas oublié, source d’une joie entière exprimée par l’auteur du psaume. Peut-être l’un d’entre nous, de plus en plus, quand la vie a retrouvé plus de sens, peut rejoindre cette louange. Quand d’un enchaînement à des astreintes, d’un sentiment de lourdeur dans un système étouffant le souffle intérieur, vous ou moi avons retrouvé du tonus pour notre liberté, pour des choix qui donnent du sens et qui font vraiment du bien à des personnes autour de nous.
« Je t’exalte, Seigneur, tu m’as relevé. » Il faut peut-être reconnaître que nous nous trompons de solutions, qu’il y a plutôt un renouveau, une vie nouvelle fruit d’un amour qui nous attend et le Seigneur s’impatiente que nous nous enflammions de cet amour. Ayons peur de manquer ce rendez-vous avec lui.
N’ayons pas peur de tout ce que nous risquons de perdre parce que la vie sur terre n’est pas éternelle. Craignons que cela ne rende notre vie trop étriquée, trop resserrée sur des fausses sécurités. Ayons surtout peur de ne pas accueillir le Seigneur, de ne pas entendre sa Parole avec ce qu’elle sème d’éternité, de ne pas le suivre pour aimer pour le bonheur de tous.
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