La philosophie peut-elle tenir un discours utile – bon , juste, vrai – sur l’homosexualité ?
En guise de préparation, quelques extraits sur le thème étaient repris d’émissions en Podcast sur France Culture. Une pièce de théâtre d’André Gide aussi.
Quelques éléments glanés dans ces sources.
Un psychiatre explique bien que l’homosexualité n’est pas un choix, mais qu’elle relève de nombreux paramètres. C’est une une condition à assumer. Reste à voir comment l’environnement humains aide ou est un obstacle. Cela peut devenir moins clair quand on entend aujourd’hui toute la diversité qu’on fait valoir pour l’orientation sexuelle. On laisse plus de place à ce que les personnes ressentent de leur situation, on ose moins faire valoir des normes ou une normalité. Moins de contraintes donc. Reste aussi beaucoup de réserves. Des tabous sont levés mais ce qui se passe dans l’intimité de quelqu’un n’est pas toujours dit explicitement. Il n’y a pas toujours une explication évidente pour dire des raisons et éclairer des tendances.
Les discours où l’homosexualité apparaissait comme une maladie ou une anomalie ne passent plus et on montré leur limite. Des recherches au niveau de la physiologie montrent des dispositions du corps mais humainement, ce n’est pas tout. La culture, l’éducation et par là, un certain conditionnement intervient dans la manière d’une personne de se reconnaître homme ou femme.
Si on évoque la sexualité, l’homosexualité, comme l’hétérosexualité, sont à prendre comme des capacités, des dispositions de la personne toute entière à vivre avec autrui des relations où la sexualité est présente et donc aussi les relations sexuelles. En lien avec celles-ci, on parlera plus précisément d’orientation sexuelle. Si ce n’est pas directement un choix, comme dit plus haut, admettons que se reconnaître homosexuel demande d’assumer tout un ensemble de choses dans la manière de vivre. Ainsi, la volonté doit aussi intervenir quand bien même des circonstances sociales imposeraient de cacher cette orientation sexuelle. Les questions de sexualité relèvent moins d’un tabou que par le passé, mais des limites de la liberté peuvent rester bien présentes.
Cela passe surtout par des expériences, par des influences sociales et familiales chaque fois particulières. Il faut préciser aussi que l’orientation sexuelle est autre chose que l’identité de genre (masculin/féminin)
Des témoignages montrent qu’il y a souvent eu des amours homosexuelles impossibles.
André Gide, dans sa pièce de théâtre Corydon, faisait sentir pour lui une sorte de devoir de parler au nom des homosexuels normaux. Le projet de cette pièce, Gide l’a repris plusieurs fois parce qu’il tenait vraiment à dire ce qu’il ressentait dans sa vie. Loin d’être un plaidoyer, c’est simplement une œuvre qui voudrait faire, avec humanité, un état de la situation : sa prise de parole, que la forme d’une pièce de théâtre permet de déployer, invite à respecter cette défense alors qu’à l’époque on a faisait valoir l’homosexualité comme contre-nature, qu’on en parlait comme d’une maladie, d’une déviation ou d’une faiblesse.
Une précision demande qu’on évoque quelle norme on invoque pour dire que c’est anormal, ou quelle référence on se donne (naturelle ou culturelle) pour déclarer l’homosexualité contre-nature.
Que veut dire contre nature ? C’est sans doute moins une allusion à la biologie ou à la vie des espèces naturelles, comprenons ici non humaines, où il y a d’une certaine manière des comportements sexuels entre partenaires du même sexe. Il reste qu’on ne peut pas trop vite assimiler des comportements qui demandent des descriptions différentes si on tient à décrire le comportement de personnes humaines, avec la richesse et les nuances que cela fait observer.
A propos de ce terme de « Nature » : il en est question sans doute pour dire que si la nature du sexe est de permettre la procréation, il s’agit ici d’autre chose que ce dont on parle dans l’affectivité et le ressenti des personnes.
On doit bien sûr aussi évoquer toutes les origines physiologiques de l’homosexualité mais en se disant que tout n’est pas là, qu’il n’y a pas non plus une sorte de gène de l’homosexualité.
Qu’à l’inverse , c’est sans doute une manière humaine, différente de la seule spontanéité naturelle, de chercher à comprendre pour accepter la personne avec une orientation sexuelle moins commune, interrogeant celui qui se réfère uniformément à une normalité. C’est aussi par humanité et par une bonté qui y est liée qu’on peut accompagner les personnes qui s’en posent la question, qui vivent difficilement une sorte de perturbation de ce qui leur semblait clair. Même si les situations sont difficiles à dire, même si différents blocages peuvent toujours se produire.
Évoquer l’homosexualité, quand la société considérait seule normale l’hétérosexualité, c’est assez vite une invitation à la compassion pour tous ceux et toutes celles qui se sont senties différentes. Viendrait bien une question pour d’autres personnes, qui n’ont pas ou vraiment peu d’attirance pour le sexe opposé et pour les autres ? Est-ce normal ?
Dans le climat actuel, beaucoup de situations sont loin de la forme d’une sexualité qui était associée à la procréation, au souci d’une descendance dans la famille traditionnelle. Ceci ne dit rien des personnes qui cachaient ou cachent encore leur souffrance d’un manque de reconnaissance de ce qu’elles sont dans cette forme classique. Mais se repose donc la question de la normalité. La normalité semble un jugement de valeur. Les phénomènes personnels, où se montre une ouverture plus ou moins réussie à la vie relationnelle, ne sont pas du hasard mais en laissent certains avec moins d’opportunité de ce point de vue-là. L’homosexualité peut être relue de ce point de vue également. Avec des revendications qui posent question à ceux qui restent quand même dans l’optique d’une normalité et d’un écart à celle-ci.
Dans les relations inter-personnelles, la recherche d’une bonne compréhension est importante. Le sujet de l’homosexualité questionne à ce propos. Parce que joue une différence à propos d’un ressenti souvent difficile à exprimer : un ressenti très intime, et la compréhension n’est pas évidente non-plus parce que l’attirance sexuelle, dans ce qu’elle montre ici de différent, peut amener simplement à un devoir de respect, à un sentiment de soutien devant des injustices, mais avec un manque quant à la manière de se mettre à la place de l’autre.
Ces propos demanderaient sans doute un préalable que des psychologues et sexologues pourraient donner pour décrire les phénomènes, pour dire les influences. Humainement, au delà de l’observation, on cherchera aussi à reconnaître l’importance de l’amour, avec la gratuité qui y est liée. Important aussi, la reconnaissance mutuelle dans les relations. C’est sans doute plus important que ce qui classe les personnes comme différentes.
Là aussi, ce sont des jugements et des manières de voir qui se discutent et qui ne sont pas partagés par tous. Café philo, avec le droit à chacun à dire son avis, c’est toujours aussi un riche exercice , une expérience riche et enrichissante de pouvoir discuter de cette manière ainsi avec ces questions, ses positions et son écoute cordiale.